Randonnée dans le désert du Gobi

30 août 2019 | Laura Charabot

Photo credit: Mateusz Waligóra

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Relever des défis extrêmes est naturel pour l’explorateur du National Geographic Mateusz Waligóra. En 2018, il est devenu le premier homme à traverser le désert du Gobi en solitaire. Il a transporté son équipement sur des pistes et des terrains désertiques extrêmes. Nous l’avons rencontré pour découvrir ce qui le motive.

Qu’est-ce qui vous motive dans vos aventures dans le désert?

J’ai toujours aimé le plein air. Enfant, je passais des heures près d’un lac, je marchais sur l’eau gelée en hiver et j’imaginais que j’étais en excursion vers le Pôle Nord. Seule l’ampleur des aventures a changé. Aujourd’hui, je marche sur les fleuves gelés de l’Himalaya ou à travers les déserts de l’Australie. Et, je ne peux pas m’imaginer travailler de 9 h à 17 h. Plus il faut d’efforts pour réussir quelque chose, plus la réussite est satisfaisante. Pour 12 de mes 32 ans, j’ai consacré toutes mes décisions à devenir un aventurier professionnel. Même si cela n’a pas toujours été facile, ce que je fais me rend heureux.


Racontez-nous votre expédition dans le Gobi.

C’était important pour moi de le considérer comme un défi personnel. Mais, en même temps, je suis devenu le premier homme à réussir la traversée de la région mongolienne du désert de Gobi en solitaire. En 58 jours, j’ai traversé 1 785 km de désert, en transportant ma nourriture, mon eau et mon équipement sur une charrette spécialement conçue pour le voyage, le tout pesant 200 kg.


Mateusz Waligóra assis réparant l'équipement

Pousser les activités extérieures à l’extrême inclut réparer son équipement au milieu de nulle part.


Qu’est-ce que vous a poussé à continuer cette difficile randonnée?

Ce voyage m’a poussé aux limites absolues de mon corps. J’ai perdu 24 kg et j’ai subi de nombreuses blessures, dont certaines qui me feront souffrir pendant des années. J’ai atteint mon but principalement grâce à la volonté. À 500 km de la fin, j’ai écrit ces mots dans mon carnet : « Il y a tellement d’orgueil dans cette exploitation instrumentale et inutile de mon corps que je me sens mal jusqu’au plus profond de moi. Je sens un besoin puissant d’arrêter de marcher; et pourtant, il y a un autre sentiment encore plus fort en moi : tenir bon jusqu’à la fin. »


Comment avez-vous géré la solitude?

La solitude est un danger et une bénédiction en même temps. Elle me dérangeait au début de l’expédition, mais elle est graduellement devenue une alliée. Faire face au désert par moi-même était le seul choix pour moi. Le désert est comme un miroir où vous pouvez voir votre réflexion. Il n’y a ni filtres ni options de modification. Il n’y a que moi. Je ne joue aucun rôle puisqu’il n’y a aucun public. Durant cette douzaine de jours, j’étais vraiment authentique.


Mateusz Waligóra à l'intérieur d'une tente illuminée pendant la nuit noire

Le silence absolu du camping dans le désert.


Quelles leçons pouvez-vous partager de cette aventure?

L’expérience et toutes les connaissances que j’ai acquises durant ce voyage se résument difficilement en quelques phrases, donc j’écris un livre sur ce voyage et des expéditions précédentes pour le faire. En résumé, j’ai réalisé (encore une fois) que les gens peuvent accomplir des choses qu’ils n’imaginent même pas. Ils ont la volonté et la force. Ils n’ont besoin que du courage de les trouver en eux.


Avez-vous eu de l’aide ou du soutien?

Cette expérience a été effectuée sans soutien externe. J’ai utilisé seulement ma nourriture, sans livraison prévue à l’avance d’eau et de nourriture et sans aide. J’ai rencontré de nombreux nomades dans le Gobi et j’ai toujours refusé leur aide. Cependant, leur présence dans des moments difficiles a eu un effet réconfortant pour moi.


Chameaux dans le désert de Gobi

Repérer les chameaux - "Parfois, je pouvais les sentir avant de pouvoir les voir".


Y a-t-il un moment particulier du voyage qui est plus marquant?

Je vais certainement toujours me rappeler le moment où j’ai aperçu la ville de Sainshand, ma destination finale, à l’horizon. C’était émouvant. Toutefois, en vérité, tout le voyage a constitué un moment exceptionnel.


Quelle est votre relation avec la nature? Comment nourrit-elle votre mission?

La nature est la plus grande force derrière tous mes voyages. Les objectifs des prochaines expéditions portent généralement sur des endroits non habités; les déserts, les montagnes élevées ou l’Arctique sont des endroits où je me sens bien parce que je peux y découvrir une nature intacte.


Statistiques de l’expédition :

Distance : 1 785 km de désert
Durée : 58 jours
Style d’expédition : En solitaire, sans aide
Équipement : 200 kg de nourriture et de matériel